Affaire Merah : le CSA intervient
Le Conseil supérieur de l’Audiovisuel (CSA) se penche sur le cas Merah. L’autorité audiovisuelle a annoncé qu’elle procéderait demain, mardi, à l’audition des dirigeants de TF1 et entendra ensuite ceux de BFMTV et iTélé, dans le cadre de sa séance plénière, qui se tient traditionnellement le mardi matin. Le CSA entend ainsi réagir à la diffusion dimanche par TF1 et sa filiale LCI d’extraits d’enregistrements audio entre Mohamed Merah et les policiers du Raid puis repris par les deux chaînes d’information BFMTV et iTélé, ainsi que par différentes radios. Concernant ces dernières, le CSA indique ne pas avoir encore pris de décision.
‘Ce n’est pas acceptable qu’on puisse se moquer ainsi de la douleur des familles ou manquer de respect à des personnes qui ont été blessées’, avait déclaré un peu plus tôt sur Europe 1 Michel Boyon, président du CSA, se déclarant ‘profondément choqué’. Pour Michel Boyon, TF1 aurait dû demander un avis consultatif au CSA avant la diffusion. ‘On a l’habitude de dialoguer avec les chaînes sur ce genre de choses’, a-t-il expliqué. M. Boyon a dit avoir téléphoné dès dimanche soir ‘à tous les dirigeants de chaînes de radio et de télévision en leur demandant instamment de ne pas diffuser ces images’.
Enquêt préliminaire
Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire pour violation du secret de l’instruction après la diffusion de ces enregistrements audio de Mohamed Merah, qui a tué en mars sept personnes en se réclamant d’Al Qaïda, a-t-on appris auprès d’un avocat des parties civiles. Me Jean Tamalet, qui défend Atim Ibn Ziaten, frère du premier militaire assassiné par le ‘djihadiste’ toulousain, a précisé que les familles se concertaient et que plusieurs plaintes devraient être déposées.
TF1 a expliqué que les documents diffusés contenaient ‘des informations très importantes’ sur la façon dont les policiers avaient négocié jusqu’au bout pour que Mohamed Merah se rende’ et a mis en avant leur ‘valeur informative’.
Cette divulgation a cependant indigné les familles des victimes et une partie de la classe politique. Or, la bande sonore, qui venait d’être expertisée, avait été placée sous scellés et les avocats n’en avaient toujours pas reçu copie, justement pour empêcher sa divulgation.
La police en cause ?
Me Tamalet s’est interrogé sur le fait de savoir si la fuite ne venait pas d’un service de police. ‘Nous savons que cet enregistrement n’est pas entre les mains du parquet et des avocats et qu’il n’est actuellement physiquement détenu que par la police scientifique et par les services en charge de l’enquête’, c’est-à-dire la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI) et la Sous-direction antiterroriste, a-t-il dit à Reuters. ‘Par déduction, est-ce qu’on ne peut pas légitimement se demander si c’est la DCRI, la SDAT ou le laboratoire de police scientifique qui a eu à un moment ou un autre intérêt (…) à transmettre la copie à la presse ?’, a-t-il demandé.
‘On n’en est plus au stade de l’ouverture d’une information judiciaire. Le fait de diffuser un élément couvert par le secret de l’instruction signifie un recel’,a dit pour sa part à Reuters Me Mehana Mouhou, avocat de la famille d’Imad Ibn Ziaten, le premier militaire tué. ‘Le procureur peut mettre le PDG de TF1 (Nonce Paolini, NDLR) et le producteur de l’émission (Emmanuel Chain) en garde à vue et solliciter leur mise en examen’, fait valoir Me Mouhou.
Il a exhorté le procureur ‘à prendre ses responsabilités’ et a dit ne pas exclure d’en appeler à la ministre de la Justice Christiane Taubira. L’avocat a mis en avant l’impossibilité pour les familles de faire leur deuil face à ce qu’il a qualifié d »horreur absolue’. ‘La mère d’Imad, lorsqu’elle a vu le début de l’émission, a été malade toute la nuit. Cette famille est déjà abîmée par le crime, tout cela rajoute du traumatisme’, a-t-il estimé.
La Société des journalistes de TF1 estime dans un communiqué que la diffusion des enregistrements par la chaîne est ‘parfaitement légitime’. ‘Nous respectons l’émotion des familles des victimes. Mais ce document contient des informations importantes et rien ne saurait s’opposer à sa publication. Cette diffusion relève du droit à l’information’, dit le communiqué.
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